« Manglo » – prononcez [mojo] – qui est d’ailleurs le nom de leur dernier album – est un groupe de chanteurs né à Saint-Vincent-sur-Oust (le rond de Saint-Vincent, vous connaissez ?) en 1996. Ces copains d’enfance sont l’expression de la tradition chantée en pays de Redon (sud Bretagne). Leur répertoire est celui des anciens mais également celui qu’ils composent. Wenceslas Hervieux amène sa touche (et les touches piano de son accordéon !) dans les arrangements spontanés ou inspirés des musiques qu’il a côtoyées.

Le pays de Redon a été le dernier terroir de Haute Bretagne, de la Bretagne romane, à conserver sa tradition populaire orale. Il a été aussi le premier à redevenir un pays de chanteurs, le « pays qui chante », grâce au Groupement Culturel Breton des Pays de Vilaine et à la « Bogue d’or » créés en 1975, qui ont su revaloriser auprès des jeunes générations la pratique naturelle du chant, a capella.

Les chanteurs de MANGLO ont l’âge de ce renouveau et en sont aujourd’hui une des expressions fortes. Tous originaires de St-Vincent-sur-Oust, où la culture populaire n’a jamais vraiment disparu dans ce haut lieu de la danse en rond, ils reprennent, mieux, revisitent de façon forte et originale le fonds local. […]…Cela vaut à la fois par le caractère pratiquement inédit – ou du moins non répertorié – de certains airs et chants, mais aussi par la tonicité et la « mise en scène » des voix et leur accompagnement discret et intelligent.

Manglo, une formation représentative du foisonnement musical actuel de la Haute Bretagne, un exemple réussi d’adaptation d’une grande tradition populaire aux besoins d’aujourd’hui, à la fois expression de la communauté rurale d’hier et facteur de cohésion sociale dans une société contemporaine de plus en plus éclatée.

Jean-Bernard Vighetti

C’est une bien vieille histoire que celle de Manglo. Prononcé [Moyo-mañyo].

En 1648, on en parle déjà, lors d’un premier procès entre riverains de la Rivière d’Oŭd en Bains-sur-Oust et ceux de la frairie du Ménéhy en Saint-Vincent-sur-Oust, aux confins du Vannetais oriental. Conflit déjà latant depuis deux cents ans, dès lors que les Seigneurs de Rieux voulurent céder leurs droits aux riverains.

Le litige résulte de l’appropriation de l’île Moglote, située dans les marais de Manglo, par les frairiens des deux rives. Manglo s’étend entre la Butte de la Lune, où l’herbe égarante vous fait perdre de nuit votre chemin, et Mannétan (la colline du feu ; la Roche du Theil aujourd’hui) où soit disant de lointains sacrifices furent commis. Cette île marécageuse est au gré des caprices du courant et des marées, un pâturage, une pêcherie, et un tergetage* tantôt vincentais, tantôt bainsois. En 1827, cette situation conflictuelle est encore relatée devant les tribunaux, bien évidemment au bénéfice des vincentais.

Il faut attendre 1996 pour réveiller cette histoire en chanson, grâce à la rencontre de jeunes vincentais, rompus au répertoire chanté de leur commune, en quête d’une appellation « originale» : Manglo.

Nos lurons investissent régulièrement ces lieux mythiques. Ils chantent, dansent toute la nuit et perpétuent ainsi la tradition du rond de St Vincent.

Gilbert Hervieux

 

[Tergetage : Coupe du foin dans les marais. Appelé également  « fouage ».]

La Chatouillouse – album « Manglo sort de son lit »

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